L’impression d’oeuvres pose un problème bien contemporain, en pièce unique, comme en séries limitées.
En effet, il n’y a ne serait-ce que 50 ans plus tôt, les tirages étaient techniquement et éthiquement limités. Or, le commerce d’art actuel, et les techniques d’impression modernes poussent à la consommation et au non-contrôle des impressions.
En pratique, un artiste et un « voleur » d’oeuvre peuvent tous deux réaliser un tirage de grande qualité, et le faire passer pour un tirage limité, alors qu’il n’y a pas si longtemps il était difficile de reproduire un négatif photo, ou une plaque d’estampe.
Pour pallier ce problème majeur, voici quelques règles simples à suivre si vous êtes artiste, ou acheteur :
3 cas de figure sont possibles :
1. Les reproductions :
Les reproductions d’une oeuvre originale ne sont jamais considérées comme des oeuvres (pour les amis artistes traditionnels, une photo est prise de votre toile, puis des impressions sont réalisées à partir de cette photo : vous êtes dans le cas d’une reproduction). La loi ne fixe pas de limites à ces impressions, le certificat d’authenticité est sans intérêt dans ce cas. Toutefois, si elle est signée de l’artiste c’est un petit plus, et si la série est limitée et contrôlée par l’artiste, c’est aussi un plus. Par ailleurs, lorsque le papier et l’encre sont d’excellente qualité, on parle de reproduction d’art.
2. Les produits dérivés :
il arrive qu’une reproduction en nombre par une technique automatisée (affiche en offset…), dans un format différent de l’oeuvre originale (carte postale par exemple), soit signée par l’artiste, par amitié, pour une œuvre sociale ; une telle « pièce » aura une petite survaleur, mais ne sera pas considérée comme une œuvre.
3. Les oeuvres dites « multiples »
Une oeuvre est dite multiple lorsque son procédé même de fabrication implique que plusieurs oeuvres peuvent être réalisées en même temps (peinture numérique, estampes, bronze, photographies, etc….). Dans ce cas, voici ce qu’il faut impérativement respecter :
1. Signature et marquage : Comme en art « traditionnel », la signature de la pièce (unique ou en série limitée) revêt la plus grande importance. L’idéal étant de signer au dos, et au crayon de papier relativement gras (procédé qui « creuse » le papier et permet l’authentification en cas de doute). Sinon préférez une signature avec encre de chine, ou autre procédé pérenne. Un original doit comporter la signature de l’artiste, la date, son numéro au sein du tirage : 4/8 par exemple, ou pour une épreuve d’artiste : 3/4 EA (et non pas seulement EA comme nombre d’artistes font), ou la mention « pièce unique » ou « œuvre originale référencée ».
2.Certifications : les œuvres multiples les plus prisées portent une double signature : celle de l’artiste et celle de l’imprimeur ou du fabriquant (marquée de l’empreinte en relief pour la digigraphie par exemple), très difficile de faire un faux avec certificat dans ces conditions. Bien que le certificat d’authenticité soit considéré comme désuet et inutile par certains, c’est une pièce déterminante qui doit être rendue infalsifiable par une trame de fond par exemple. L’idéal étant une double certification : celle de l’artiste, et de l’imprimeur.
3. Nombre de tirages : plus le tirage est faible, plus la valeur unitaire est grande car l’œuvre d’un bon artiste ayant des chances de s’épuiser, sa cote augmentera par rareté. Un tirage au-delà de 100 exemplaires est donc une hérésie. En droit français sont définies comme œuvre d’art les photographies à tirage limité à moins de 30 exemplaires (Décret du 17 février 1995), et fontes de sculptures à moins 8 exemplaires. Si l’oeuvre n’entre pas dans ces critères, préférez les tirages respectant la définition juridique du terme « original » (Une oeuvre multiple est dite « originale » si l’artiste l’a créée spécifiquement pour le média qui supporte ses tirages); bien que contestée, cette définition impose une limite basse ; si le tirage dépasse, veillez à ce qu’il soit faible (jamais plus de 50).
4. Retirage : il n’y a pas de « retirage original », même en photo ; il peut en revanche y avoir un « retirage posthume original », AVEC l’accord de l’artiste ou de ses ayants-droits.
5. Série en formats différents ou supports différents :« l’artiste doit créer une œuvre dans un format déterminé, ne laissant pas l’éditeur les décliner à sa guise… », en clair chaque exemplaire d’une série limitée doit posséder les mêmes tailles, et caractéristiques techniques (support d’impression notamment). Dans le cas contraire, il ne s’agit plus de séries limitées, mais d’ équivalents de « produits dérivés ».
6. Fichiers informatiques : n’achetez pas à prix élevé si ce n’est pas l’artiste lui-même qui détient les fichiers masters (fichiers numériques haute résolution) et qu’il ait signé et numéroté le tirage lui-même. Par ailleurs, obtenez l’assurance que le fichier numérique haute définition est détruit après tirage.
7. Qualité du support : Tous les types d’impression sont acceptables, en théorie. En pratique, assurez-vous qu’il s’agit bien d’un tirage d’art (papier et encres) pour ne pas avoir de mauvaises surprises en terme de durée de vie de l’oeuvre (encres qui passent, papier qui ne résiste pas au temps).
En résumé : Pour une oeuvre originale multiple, vérifiez toujours : la signature, la double certification artiste/fabricant, le nombre de tirage, la qualité du support. Pour une reproduction, préférez les séries limitées signées et un support de qualité, sans pour autant être trop exigent. Pour un produit dérivé, vérifiez que le prix est cohérent avec l’objet sans y inclure la notion d’oeuvre puisque ce n’en est pas une.
Quelques sites intéressants, n’hésitez pas à faire vos propres recherches sur internet:
http://www.almanart.com/quel-tirage-prix-compromis.html
http://www.ame-nature.com/index.php/statut-et-ventes/84-les-criteres-dun-tirage-dart
http://blog.droit-et-photographie.com/tirages-numerotes-et-droit-des-contrats/
Bonjour, j’ai une « photocopie » d’une photo sur un papier assez épais et l’artiste a signé la marie-louise qui est autour.
Le photographe a signé « belanopeck 08 ».
Cette « reproduction » a t-elle de la valeur svp ?
Merci
Bonjour Béatrice, difficile à dire. Une mention portée sur une marie-louise n’a aucune valeur en elle-même, mais il faudrait voir si cette « reproduction » est signée au dos, ou en façade, et surtout s’il y a une mention de sa place dans la série (8/50 par exemple). Si ce n’est pas le cas, j’ai bien peur que cela n’ait pas plus de valeur qu’une simple affiche. Mais le mieux serait de montrer cette pièce à un galeriste.
Bonjour, merci pour votre article très clair et bien documenté. Dans le décret, je ne vois mention que de 30 exemplaires pour les tirages photos, vous indiquez 12 tirages pour les oeuvres numériques. Où peut-on trouver mention de ces 12 exemplaires ? Si je vous suis, le traitement serait différent selon qu’il s’agisse d’une photo argentique (30 ex max) ou d’une photo numérique (12 ex max). Est-ce que j’interprète correctement ?
Bonjour Emma et merci pour votre commentaire. Il m’a permis de réaliser que la loi avait été modifiée hier :). Mais cette modification ne concerne pas la photographie dont la limite demeure à 30 tirages, qu’elle soit d’origine argentique ou numérique (la précision des 12 exemplaires concernait la PEINTURE numérique ce qui est sensiblement différent.)
Bonjour j ai acheté des lithos a une amie de les beaux parents qui tenait une galerie à Paris avec son mari j en ai une de Laporte signe et c est tout j en ai une autre de Tobias signe et en bas à gauche note E A ensuite une de Valadie avec note E Amitié et une de Toffoli EA je les ai acheté en 1985 environ est ce que ça de la valeur je les ai payé chacune 500 Francs a l époque merci de m éclairer car
N étant pas numérotées ont elles moins de valeur les dimensions 0,75 cm de long sur 0,55large
Merci pour votre reponse
Et que serait leur prix après 32 ans depuis mon achat merci
Bonjour
Il me semble que les épreuves notées EA (Epreuve d’artiste) n’ont pas besoin d’être numérotées. Concernant leur valeur c’est impossible à dire sans les voir et sans connaître la côte de ces artistes. Par ailleurs je suis moi même artiste et non expert en estimation. Le mieux que je puisse vous conseiller est de vous rapprocher du service (en ligne et gratuit) d’estimation de chez Drouot. voici le lien http://www.drouot-estimations.com . Merci de votre commentaire.
Bonjour,
J’ai un reproduction signé d’un photo d’un artiste photographe. Ces oeuvres originales argentiques sont evalués 5000 euros.
Pourriez vous m’indiquer plus au moins la valeur des reproductions signés?
Bonjour, Hélas non. Impossible de vous répondre, il faudrait connaître la côte des reproductions de cet artiste, si ce sont des séries limitées, son numéro éventuel dans la série, etc, ….. Je vous recommande de vous adresser à une galerie, et d’y aller avec votre reproduction. Bien cordialement.
Bonjour,
Reproduire son même dessin manuellement est il considéré comme une reproduction ?
Dans ce cas combien de reproductions faites à la main est il possible (légal) de faire?
D’avance je vous remercie pour votre réponse.
Bien à vous
Frédérique
Bonjour,
J’avoue que c’est une question à laquelle je n’ai pas de réponse :). Je ne saurais pas dire si lorsqu’un artiste reproduit ses propres oeuvres à la main, on parle réellement de reproduction. Peut-être s’agit-il plus d’une série d’oeuvres à la manière de Warrol ? En tout cas cela vaudrait la peine de se renseigner. Je poserais la question autour de moi jusqu’à ce que je trouve une réponse :).
La définition juridique de la reproduction est assez incertaine, mais semble admettre les variations de motif: dans l’absolu donc et à condition de ne pas introduire trop de variations, la réponse est oui, il s’agit d’une reproduction!.
En revanche, il ne s’agit pas d’arts « d’édition »….donc vous pouvez faire autant de reproductions que souhaitées.
Vous vous retrouvez ici dans la situation paradoxale d’une reproduction, (au sens large) qui est également une oeuvre originale.
Bonjour, peut-on faire des produits dérivés d’après le même modèle qu’une série limitée? Je m’explique: je suis artiste peintre, je fais des reproductions de mes tableaux en série limitée, signées et numérotées en 30 exemplaires dans le format de l’original. Je souhaite faire des cartes postales, même dessins mais formats et supports différents, non numérotés, non signés. Est-ce que cela ne rentre pas en contradiction avec « la série limitée »? Merci…
Bonjour,
Vous pouvez tout à fait créer des produits dérivés à partir de vos oeuvres. Le fait que le format et le support soient différent, que ces produits ne soient ni numérotés ni signés, les exclue d’entrée de jeu de la catégorie « oeuvres originales ». Il n’y a pas de contradiction « légale » à mon avis. En revanche, il y a peut-être une contradiction morale dans le sens où le fait de multiplier les supports différents me semble diminuer la valeur de chaque reproduction (oeuvre ou produit dérivé) sur le principe du « plus y’en a moins c’est cher ». Pour ma part, je choisirais entre produit dérivé OU reproduction en fonction de l’oeuvre originale. Mais ce n’est que mon opinion.
Bonjour,
Votre article m’a beaucoup aidé et a clarifié quelques zones sombres. Je découvre dans le même temps le site d’un étonnant artiste et de très jolies œuvres. Merci beaucoup.
Je vous souhaite le meilleur pour la suite.
Joseph Jeanmart – Bali rétro
Question: Mon oeuvre original mesure 40 x 40″.
Je vend une edition limité 24 x 24″.
Si quelqu’un voudrais acheté un gyclée en format original, doit-elle etre numeroté faisant suite a la serie 24 x 24, ou deviens-elle une autre edition limitée du au changement de format, 40 x 40 vs 24 x 24?
Merci
Bonjour, d’abord merci pour ces précieuses informations, c’est vraiment très compliqué de trouver des réponses concrètes sur le sujet…
Je suis illustratrice et j’aimerais faire reproduire en Giclée Print (impression pigmentaire de haute qualité considérée comme impression d’art) certaines de mes gouaches. Je me demande si je dois dès maintenant choisir un nombre de tirages limité et les numéroter ou si cela ne sert à rien ?
D’autant qu’un autre problème se pose, il y a une personne qui m’a contactée car elle serait intéressée par un tirage en format A2 tandis que je préfère pour des raisons de demandes plus fréquentes imprimer la majorité en A3. Est-ce que dans ce cas l’impression en format A2 entre dans le décompte des tirages numérotés ou non ? Et est-ce légal et possible de numéroter des tirages A3 en un nombre limité et des tirages A2 de la même oeuvre en repartant de zéro et également en un nombre limité.
Exemple :
-50 exemplaires en format A3 numérotés 1/50, 2/50 etc.
– 15 exemplaires en format A2 numérotés 1/15, 2/15
ou la différence de format ne change pas ?
En vous remerciant par avance pour votre réponse,
bien cordialement
Alizée Cayla
Dans la mesure où se seront des reproductions (et non des œuvres originales multiples), vous êtes libre de choisir les variations de format ou de nombre de tirage qui vous conviennent. Les reproductions en série limitée signée sur papier d’art permettent un prix de vente un peu plus élevé qu’une simple affiche en impression illimitée, mais ne deviennent pas des œuvres originales pour autant. Ce type de choix se fait surtout pour satisfaire des clients désireux d’acheter à moindre coût. A voir donc en fonction de la demande que vous avez sur certaines œuvres (exemple : 50 tirages pour une œuvre qui plait beaucoup, 10 pour une qui est moins demandée etc, dans le format que vous voulez). Une belle journée à vous.